Recrutement
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Recruter sans fonction RH : mission impossible ? Pas pour les startups !

Rédigé par

Anaïs Le Digarcher

23
October
2025

Startup en croissance, produit solide, business model validé, mais… Aucun RH à l’horizon. Dans les premiers mois, voire les premières années, les dirigeants d’entreprises se débrouillent souvent seuls dès qu’il s’agit de recrutement. Une situation fréquente, mais risquée si elle n’est pas cadrée. Alors, est-ce vraiment mission impossible de recruter sans fonction RH ? Thierry Andrieux, multi-entrepreneur, co-fondateur d’EFIMOVE.ai, une startup qui accompagne les entreprises dans leur déploiement de l’IA, conjugue son retour d’expérience avec celui d’Aaron Teboul, CEO de CLIC&MOI, la startup qui rapproche les générations.

Pourquoi les startups zappent (à tort ou à raison) la fonction RH ?

La plupart du temps, les startups ont des techs, des commerciaux, mais il leur manque l'expertise RH en interne. Prenons le cas d’EFIMOVE.

EFIMOVE, c’est une jeune startup spécialisée dans l’IA, co-fondée par Thierry Andrieux et Sébastien Raynoird-Thal. À eux deux, ils gèrent le pilotage global. Thierry sur les fonctions transverses (finances, ressources humaines, juridique), Sébastien le pôle tech et le management opérationnel.

Si l’équipe paraît peut-être restreinte (8 personnes), elle est en revanche déjà structurée côté technique. Leur challenge actuel : embaucher des profils commerciaux (SDR - Sales Development Representative et responsable commercial) pour soutenir leur développement.

Comme souvent dans les organisations naissantes, il n’y a pas de fonction RH internalisée. Et oui !

Thierry explique : “Les profils techniques et business sont prioritaires en startup. Au cœur d’EFIMOVE, avec une dominante tech, forcément, le recrutement est un défi. Pour les startups en général, l’absence de RH peut rapidement se faire sentir, surtout sur le plan juridique.”

Une réalité expérimentée également par Aaron au sein de CLIC&MOI. Au démarrage, tout le poids RH reposait sur les fondateurs. C’est un passage obligé dans une phase de forte croissance, où l’impératif reste de faire tourner la machine.

Les RH sont donc les grands oubliés des startups. Pourquoi ?

Selon Thierry, ce domaine est vu comme un coût, c’est ça le premier frein. Pourtant, ne pas investir peut être bien plus coûteux : “Il y a des gros enjeux, notamment réglementaires, contractuels, ou avec le traitement de la paie. Et si tu ne fais pas les choses correctement, tu le payes plus tard.”

Mieux vaut avoir un regard expert, en particulier sur les sujets légaux, ou la relation avec l’inspection du travail. Et s’il n’encourage pas nécessairement à recruter un RH à temps plein dès le départ, Thierry insiste sur l’importance de se faire accompagner.

Quelques pistes sécurisantes (et plein d’options à envisager) :

  • Le temps partagé : solliciter un expert RH pour cadrer les process,
  • L’audit externe : évaluer l’existant avec un cabinet pour implanter les bonnes bases,
  • Le management de transition : confier les ressources humaines temporairement à un expert,
  • Les associations de seniors : faire appel à des professionnels retraités et bénévoles, pour structurer.

Pour Aaron, il s’agit de conjuguer bons outils et bons réflexes internes.

“Par exemple, on documente nos process de recrutement dans Notion, on formalise les missions avant d’ouvrir un poste, et on fait relire nos contrats par un avocat partenaire. Nous avons aussi fait appel ponctuellement à un cabinet externe pour valider nos pratiques et nos trames d’entretien.”

OK. Mais, quand faut-il donc officialiser une fonction RH en interne ?

D’après Thierry, si la question se pose, c’est qu’il est justement temps d’internaliser. Aaron lui, estime que si le recrutement devient plus continu qu’occasionnel, il mérite une vraie coordination RH. Ne serait-ce que pour la structuration, la formation et le bien-être au travail. À ce stade, le rôle ne se limite plus à recruter, mais à accompagner la montée en compétences et la culture d’entreprise.

En attendant, reste donc un autre pan très opérationnel pour lequel les dirigeants doivent s’activer : le recrutement !

Recruter sans RH, mais non sans risque

Si l’absence d’un ou d’une RH se comprend dans un contexte de ressources limitées, toutefois, le recrutement reste un enjeu trop stratégique pour être improvisé. Vraiment.

Sans soutien, les erreurs s’accumulent et peuvent valoir cher.

Thierry Andrieux, en tant qu’entrepreneur, le constate : “En startup, le recrutement est parfois géré en interne, sans formation spécifique, ni outils, ni méthode. Résultat : on fait « comme on peut ». Et ça, c’est jouer avec le feu.”

Voici les principaux écueils à garder en tête…

La méconnaissance des métiers à recruter :

Sans maîtrise du métier du candidat, difficile d’en évaluer les compétences clés. C’est ce qu’a vécu l’associé de Thierry, au profil très tech, lorsqu’il a fallu recruter des commerciaux. Sans repères, impossible de détecter les signaux faibles ou les véritables expertises.

Les mauvaises questions :

“Est-ce que vous connaissez Excel ?” - Une question fermée, classique, mais peu efficace. Et c’est finalement naturel quand on n’a pas l’habitude d’interviewer. Sans méthode, on pose les mauvaises questions, on empêche le candidat de développer ses réponses. Ce qui amène à passer à côté des éléments importants.

L’ignorance des aspects légaux du recrutement :

Questions discriminantes, filtres illégaux, formulations bancales… Des erreurs se produisent. Les barrières à ne pas franchir sont peu connues. Ce qui devient une vraie préoccupation pour les startups. En effet, ça les expose potentiellement à de lourdes conséquences juridiques. D’où l’intérêt de s’entourer de partenaires et de s’éduquer sur le sujet.

Un choix assumé par Aaron : “Nous, on s’appuie sur des modèles contrôlés par nos avocats. Le recrutement, c’est sérieux. Zéro risque !”

La course au recrutement :

Les startups sont souvent pressées de renforcer leurs équipes. Sauf qu’un mauvais recrutement coûte plus cher qu’un poste resté ouvert un peu plus longtemps. Aaron appelle à ralentir pour mieux mesurer la compatibilité culturelle et la capacité à travailler dans un environnement en mouvement.

Le piège du feeling :

Le fameux feeling. Celui tant redouté par les professionnels RH. S’il semble intéressant et utile pour beaucoup, il reste hautement subjectif et vient parasiter la prise de décision. Le danger, pour Thierry, c’est de confondre fluidité de l’échange, sympathie pour un candidat par exemple, et adéquation réelle au poste.

“C’est tentant de croire que le feeling est un allié, mais c’est en fait un faux ami. Parce que le feeling, ça veut tout dire et rien dire, en fait. C'est impalpable.”

Ces faux pas ne sont pas une fatalité. Ils ne remettent d’ailleurs pas en cause la valeur des fondateurs, des dirigeants ou des managers.

Seulement, ils soulignent une chose : recruter, ça s’apprend.

Et même sans RH, des solutions existent pour éviter les erreurs de casting.

Premiers recrutements en startup : 5 bonnes pratiques à adopter

Une fois confronté aux erreurs fréquentes, comment progresser quand on recrute sans fonction RH ?

Thierry, entrepreneur mais aussi recruteur aguerri, partage les leviers qu’il active chez EFIMOVE pour fiabiliser les embauches. Une liste ponctuée par les pratiques d’Aaron au sein de CLIC&MOI, accessibles et applicables pour les dirigeants d’entreprise. Et pas que !

1. Pratiquer une écoute active et ciblée

Pas de bon recrutement sans bonne écoute. Pour Thierry, ça débute par des questions claires, directement liées aux attentes du poste. Être à l’écoute, oui, mais sans partir dans tous les sens : “Il faut rester aligné au besoin, garder une posture pro et humaine à la fois.”

2. Miser sur la transparence et la reformulation

Durant l’entretien, Thierry invite les candidats à parler de leurs réussites. Il reformule leurs propos pour confirmer la compréhension mutuelle et capter les écarts possibles. Voilà qui crée un climat sain, sans laisser place à la surinterprétation.

Aaron complète : “Ça marche dans les 2 sens. On préfère être très clair sur les contraintes et les zones d’incertitude. Et les candidats apprécient cette honnêteté.”

3. Rendre ses recrutements plus objectifs

Aaron évoque le pouvoir des mises en situation. Ou encore des cas pratiques tels que des mini-analyses ou un mail client type. Couplé aux grilles et entretiens structurés, il observe ainsi la logique du candidat, de manière concrète, plutôt que de se baser uniquement sur les discours.

4. Se former pour s’améliorer

La sensibilisation aux biais et aux pratiques légales est essentielle. Thierry suggère de s’appuyer sur des ressources telles que celles proposées par l’association À Compétence Égale, qui accompagne les entreprises sur les enjeux de non-discrimination à l’embauche. La base !

Le bonus d’Aaron : “Toutes nos annonces passent par une relecture interne pour vérifier le wording et on écarte les questions personnelles en entretien. Nous sommes intransigeants.”

5. Intégrer d'autres regards dans le processus

Impliquer les équipes, voire des regards extérieurs, permet de verrouiller l’évaluation métier et de diversifier les points de vue. L’évaluation et la décision collégiale, c’est courant chez EFIMOVE : “En croisant les évaluations, et si plusieurs personnes vont dans le même sens, on réduit la marge d’erreur.”

Aaron s’accorde avec cette dynamique. En débriefant les entretiens à chaud, entre personnes impliquées, dont a minima un futur collègue, ils se protègent des failles éventuelles. Et conservent une trace écrite au passage.

Ces pratiques ne demandent ni gros budget ni expertise RH pointue, mais elles constituent les bases d’un processus solide. Et si, pour aller plus loin, vous activiez la force de votre réseau ?

La recommandation, un levier pour recruter “sans être recruteur”

De nouveaux outils ou applications font surface, pour aider les startups dépourvues d’une fonction RH à sécuriser leurs recrutements. De canaux complémentaires en somme.

Pour Thierry, la recommandation est un modèle gagnant, une approche qui fait ses preuves.

Selon Aaron, c’est un levier puissant, d’autant plus quand l’entreprise grandit vite.

Recruter par recommandation externe, c’est mobiliser un réseau de prescripteurs “métier”, capables d’identifier des profils pertinents. Vous n’avez pas besoin de maîtriser tous les codes RH pour sourcer : les “propellers” de Proppl, eux, connaissent les compétences clés du terrain.

Proppl, c’est une solution taillée pour les contraintes startup.

  • Crédibilité renforcée : les candidats sont recommandés par des pairs qui parlent leur langage.
  • Gain de temps : les talents sont déjà préqualifiés d’une certaine façon.
  • Moins d’erreurs : la présélection limite les recrutements “au feeling” ou hors cible.

Thierry confirme : “Avec Proppl, tu sais que les profils ont été validés en amont. C’est comme si des prises de références étaient réalisées au préalable. Pour nous, c’est un gain de fiabilité, en phase avec nos besoins, puisque Proppl couvre les fonctions tech et commerciales.”

Aaron ajoute : “La dimension communautaire et le filtre “métier” font la différence. C’est exactement le genre d’outil dont les startups ont besoin, car chaque embauche compte.”

Et ça, on aime !

Une alternative agile (et complémentaire) à l’offre d’emploi classique, ou au recours systématique de cabinets de recrutement. Une spirale positive pour toutes les parties prenantes, prescripteur, candidat et évidemment, employeur.

De l’absence de RH en interne à l’émergence d’une culture RH en startup

Dans bien des entreprises, les RH, ce n’est pas la priorité. C’est vrai. Vous l’aurez compris.

Par manque de finance, de temps, ou de considération, les recrutements sont relayés au second plan. Sauf que, des erreurs peuvent devenir inévitables : évaluation ratée, risques légaux, mauvais alignement.

La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des leviers pour faire autrement. Pour faire mieux. Parce que recruter sans RH, ça ne rime pas avec “recruter sans exigence”. Ni sans qualité.

À condition d’adopter les bons réflexes très tôt : se former, s’entourer, s’outiller.

C’est ainsi que l’on commence à bâtir une culture RH, même sans avoir de fonction RH en interne.